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  • : Lettres de 3 frères poilus
  • : 3 frères, Maurice, Paul, Joseph, élevés dans une famille catholique et patriote qui ne roule pas sur l'or. Maurice passe son bac de philo en 1912, comme 7000 autres condisciples. Paul vient d'obtenir son Doctorat en médecine et part sous les drapeaux pour un service militaire normalement de 3 ans. Joseph est un jeune vicaire. Leur destin va basculer au cours de l'été 1914. Voici, semaine après semaine, leur correspondance de guerre. Que leur courage ne soit pas oublié.
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5 décembre 2009 6 05 /12 /décembre /2009 19:06
 
Dans les tranchées du Nord-est de la France, Maurice le Sergent et Paul, médecin major,
semblent craindre plus les intempéries que les allemands. Joseph, l'ainé des 3 frères, prêtre-infirmier dans un hôpital de campagne des Vosges est moins exposé.
Paul revient d'une courte permission à Moras, dans le sud de la France où il a retrouvé sa mère et fait de nombreuses visites de courtoisie. Son père et sa soeur sont toujours à Maubeuge, en zone allemande.
Thiaumont

Ce 6 déc 1915

 

Mon bien cher Maurice

Je commençais à être assez inquiet lorsque ta carte m'est arrivée ce matin. Depuis les premiers jours, de novembre en effet je n'avais plus rien de toi. Enfin tu vas bien et tu me sembles devoir traversé sans indisposition les quelques jours de gros froid que nous avons eus ces derniers temps. Maintenant c'est la pluie, la boue, le vent on ne peut plus sortir les chemins sont impraticables. Je crois t'avoir raconté les incidents et les impressions de mon voyage. Jean l'adjudant a eu 8 grands jours de permission à l'occasion du service de son frère. Je joins à ma carte une petite photographie qui me représente entre Jean et Pierre N.. Quand tu pourras tu l'enverras à Paul en le priant de la faire suivre à Moras. Le discours qui a été prononcé pour le service de Paul est maintenant imprimé. J'en ai envoyé un exemplaire à Mr M.. Je n'ai toujours rien de Paul. Il a déjà profité d'une seconde permission. Quand  sera-ce ton tour ?? Allons soigne toi du mieux possible ; garde pieusement la santé de l'âme et du corps. Je t'embrasse de tout coeur.

Joseph

 

Ce 8 décembre 1915

 

Mon cher Maurice

 

comment vas-tu ? Tu n'écris pas souvent. Il est vrai que je te donne l'exemple de la paresse. Je t'ai dit que j'avais obtenu dans le milieu de novembre une 2e permission. Je l'ai passée à Moras naturellement où j'ai vu Maman en bonne santé. J'ai fait pas mal de visites à l'aristocratie et à la bourgeoisie : partout on m'a reçu fort bien. Et maintenant me voici de nouveau dans le train de vie habituel. Nous sommes en ce moment au bivouac, et la pluie, le froid, la boue nous en font voir de toutes les couleurs. Pourtant je n'ai pas eu à soigner encore de gelures des pieds. Avez-vous des bottes de tranchées ? Je te recommande de bien graisser ou suifer tes pieds ainsi que tes chaussettes et chaussures à l'intérieur et à l'extérieur. Je t'ai envoyé il y a 3 jours un paquet contenant du tabac et 3 paires de chaussettes. Tu me diras si elles te vont. La fin de l'année approche et 1916 aussi. Cette nouvelle année verra je pense la fin de la guerre. Allons bon courage. Je t'embrasse bien fort.

Dr Paul B.

 

Le 9-12-15

 

Bien chère maman

 

Notre temps de repos se passe et tire à sa fin, c’est en effet samedi que nous regagnons nos boueuses tranchées. On nous y conduit en auto, car on est loin, même secteur, par conséquent nous le connaissons déjà.

Je vais toujours bien malgré la pluie qui tombe sans arrêt. Le froid heureusement a cessé. Ici au cantonnement on dort fort bien, paille à volonté ; on peut bien se ravitailler en vin, beurre et lait ; aussi à la popote fait-on chocolat au lait tous les matins avec tartines grillées et beurre. Hier 8 décembre nous avons célébré l’Immaculée Conception le mieux que nous avons pu ; messe et communion, le soir vêpres avec chants et discours (le colonel et le commandant y assistaient. Nombreuse assistance, c’était splendide ; j’ai bien prié pour toi et surtout pour Papa loin de nous. Je t’embrasse de tout cœur.

Maurice

 

Ce 13 décembre 1915

 

Mon cher Maurice,

 

Je reçois ta carte qui a dû se croiser avec les miennes; Ma santé est toujours bonne malgré un temps extrêmement humide. On a toujours les pieds mouillés : c'est dégoûtant. As-tu reçu mon petit paquet contenant  tabac et chaussettes ? N'oublie pas de me dire combien de temps il a mis pour te parvenir. Je t'enverrai demain matin un second contenant  du tabac encore. Vous devez être dans les tranchées à présent. Etes-vous à peu près installés ? Avez-vous des abris, des braseros ? Les Boches se montrent ils actifs dans votre secteur ? De toutes façons il faut toujours se méfier avec ces cochons. Mon médecin chef vient d'être relevé. Il est parti pour Orléans. Mon tour ne vient pas vite et pourtant voilà bientôt 17 mois que je suis sur le front. Enfin j'attends patiemment sans me faire de bile. C'est ce qu'il y a de mieux à faire.

Bon courage et bonne chance. Je t'embrasse de tout coeur.

Dr Paul B.


prochaines lettres vers le 15 décembre

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14 novembre 2009 6 14 /11 /novembre /2009 12:56

Pour les 3 frères Maurice, Sergent, Paul, médecin major en première ligne, Joseph, Prêtre-infirmier (et leurs parents séparés par la guerre, une sorte de routine s'est installée et ils évoquent de moins en moins une  victoire prochaine. La préoccupation principale de ces 3 soldats est devenue le climat, froid et humide en cet automne 1915, dont les rigueurs sont atténuées par les colis envoyés par leur mère; Leur père et leur soeur sont restés  en zone occupée à Maubeuge et les nouvelles sont rares...
Thiaumont

 

Le 14 Nov 1915

 

Bien chère maman,

 

J'ai reçu hier soir ton petit colis qui m'a fait grand plaisir, le beurre surtout car ici on n'en voit pas souvent. J'ai reçu la lettre en même temps. Je vois que là-bas vous êtes favorisés par le beau temps; ici il pleut sans cesse depuis notre arrivée aux tranchées et aujourd'hui la neige fait son apparition. Que va être l'hiver ? Le froid  étant le plus terrible pour nous, surtout le froid humide. A part ça rien de nouveau. Je vais toujours bien, quoique je tousse un peu. Hier nous avons été bombardés par des obus de gros calibres qui ne tombaient pas loin de notre sape ; heureusement aucun blessé. Ce matin, nous avons ramassé un boche, je ne sais pas trop ce qu'il venait faire chez nous étant sans armes. Allons à bientôt de tes nouvelles. Je t'embrasse de tout coeur. Mille baisers à Eddy et tous mes hommages à nos amis de Moras.

Maurice

 

 

Ce 6 déc 1915

 

Mon bien cher Maurice

Je commençais à être assez inquiet lorsque ta carte m'est arrivée ce matin. Depuis les premiers jours, de novembre en effet je n'avais plus rien de toi. Enfin tu vas bien et tu me sembles devoir traversé sans indisposition les quelques jours de gros froid que nous avons eus ces derniers temps. Maintenant c'est la pluie, la boue, le vent on ne peut plus sortir les chemins sont impraticables. Je crois t'avoir raconté les incidents et les impressions de mon voyage. Jean l'adjudant a eu 8 grands jours de permission à l'occasion du service de son frère. Je joins à ma carte une petite photographie qui me représente entre Jean et Pierre N.. Quand tu pourras tu l'enverras à Paul en le priant de la faire suivre à Moras. Le discours qui a été prononcé pour le service de Paul est maintenant imprimé. J'en ai envoyé un exemplaire à Mr M.. Je n'ai toujours rien de Paul. Il a déjà profité d'une seconde permission. Quand  sera-ce ton tour ?? Allons soigne toi du mieux possible ; garde pieusement la santé de l'âme et du corps. Je t'embrasse de tout coeur.

Joseph

Prochaines lettres vers le 8 décembre...

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5 novembre 2009 4 05 /11 /novembre /2009 21:28

Maurice, qui est passé presque directement du bac philo à la guerre la plus impitoyable a fait connaissance avec les tranchées humides après presque un an de convalescence. La fatigue semble l'emporter sur la peur. Ses frères Paul, médecin en première ligne et Joseph, prêtre infirmier beaucoup moins exposé, n'ont, quant à eux, pas   été blessés. Paul a pourtant participé aux dures batailles des Eparges et à l'offensive de Champagne, et s'en est tiré miraculeusement indemne. Pour tous la guerre continue et les petits colis envoyés par  leur mère, qui vit dans un village du sud, sont d'un grand réconfort. Imaginons nous un seul instant sous le froid et la pluie presque incessante de ces derniers jours, dans des tranchées humides avec en plus la menace du  "crapouillotage", la peur d'un "coup" de l'ennemi. Le 11 novembre approche : n'oublions jamais ce qu'ont enduré les poilus.

6 novembre 15

 

Bien chère Maman,

 

Rien de nouveau, je vais toujours bien et suis toujours en bonne santé. Nous sommes en repos pour le moment mais ça ne sera pas long on parle déjà de repartir en 1ere ligne ; le pauvre 48eme en prend pour sa part, je ne sais d'où cela provient ; enfin. Merci du colis, j'en profite largement; attends que je sois dans les tranchées pour m'envoyer un autre colis. Bonjour à tout le monde ; je t'embrasse de tout coeur

ton Maurice

 

8 novembre 1915

 

Bien chère Maman,

 

Nous sommes en repos, mais cela ne veut pas dire sans travail car on n'a pas le temps d'écrire ; à peine a t'on le temps de se laver. Corvées, exercices, revues et demain inspection du général de division. Je souhaite une bonne et excellente permission à Paul et lui demande de m'envoyer un petit colis tabac et cigarettes de temps en temps ; dans les tranchées ça fait plaisir. A bientôt de vos nouvelles Je vous embrasse

Maurice

 

8 novembre 1915,

 

Bien cher Joseph,

 

Te voilà de nouveau de retour à l'hopital, après ta permission déjà terminée. C'est bien court, mais enfin cela fait grand plaisir. Notre repos est fini, car on l'a rudement écourté ; au lieu d'avoir 21 jours on n'a que 11 et encore on n'a pas le temps de se nettoyer. Rien de nouveau à part cela. Mr N. m'a écrit une lettre de remerciement. Porte leur encore mon meilleur souvenir. As tu des nouvelles de Paul ? Il m'a envoyé les semaines rel. Que je renvoie à maman pour qu'elle les conserve. Demain nous retournons en première ligne, secteur mal renommé ; enfin. A bientôt de tes nouvelles. Je t'embrasse de tout coeur.

Maurice

 

Le 11 novembre 1915,

 

Bien chère Maman,

 

As tu reçu ma dernière carte ; elle t'apprends que je suis de nouveau aux tranchées pour une vingtaine. Aussi si tu envoies un colis, c'est le moment; un saucisson ce sera bien. N'oublie pas ce dernier ; en somme il faut surtout de la victuaille. Je vais toujours bien. Sommes assez tranquilles, quoique crapouillotés, mais nous avons  de bonnes sapes. Allons à bientôt de tes nouvelles. Je t'embrasse de tout coeur. Ton Maurice

Prochaines lettres vers le 14 novembre...

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23 octobre 2009 5 23 /10 /octobre /2009 21:23


Paul, le médecin major, qui avait presque achevé ses 2 années de service militaire lorsqu'a débuté la guerre, espérait être relevé au bout d'un an de campagne; au contraire le voilà de nouveau en première ligne participant à la nouvelle offensive de Champagne dont il avait quelques jours auparavant perçu les prémices sous forme d'un bombardement formidable (http://chtimiste.com/batailles1418/1915champagne2.htm)
 Maurice a depuis peu retrouvé les tranchées et leur cortège de souffrance, dont la moindre n'est pas la fatigue. Joseph, le Vicaire, est toujours de son côté dans un coin relativement tranquille des Vosges, à Bruyères en tant qu'infirmier.
Thiaumont




Ce 23 octobre 1915

 

Mon cher Maurice,

Eh! bien, comment vas-tu ? Voici déjà quelques jours quelques jours que je n'ai pas de tes nouvelles ; Tu t'es fait à ta nouvelle vie ? As-tu participé à ces dernières attaques de Champagne surtout à celle du 7 octobre (NDRL : on peut s'étonner de cette date du 7 octobre alors que c'est le 6 qu'a eu lieu la 2e  offensive générale avec notamment la reprise de la butte de Tahure ; confusion de date ?). Quelle formidable fournaise que la bataille moderne. Pour moi, j'ai pu m'en sortir encore sain et sauf. Mon régiment a donné dans les combats du 25 au 30 septembre. Il s'est couvert de gloire mais il a été fortement réduit. Nous avons subi des bombardements formidables. Un médecin auxiliaire de mon régiment a été grièvement blessé, un autre contusionné ; plusieurs membres de notre personnel de brancardiers ont été tués ou blessés. Actuellement nous sommes au repos depuis quelques jours ; nous nous reformons. Comme on apprécie la tranquillité après ces coups de chien. Joseph est peut-être en permission actuellement : ça va lui faire un gros plaisir de revoir Moras.

Allons soigne-toi du mieux possible : gare au froid. Je te souhaite bonne chance et je t'embrasse bien. Ecris très souvent, ne serait ce que quelques mots.

Dr Paul

 

Le 30 oct 1915

 

Bien chère Maman,

 

Suis toujours en bonne santé, malgré la pluie, le vent et le froid qui commence à se faire sentir. Nous sommes en repos pour une vingtaine de jours, mais le travail ne manque pas !? J'ai reçu des nouvelles de Joseph et de Paul, ainsi que de la tante. Ils vont tous bien. Joseph a, je le vois, passé une excellente permission, mais trop courte car le voilà déjà de retour à Bruyères. Les N. m'ont écrit pour me remercier de la lettre que le leur avais envoyée à l'occasion de la mort de leur fils; c'est bien triste tout ça. Aujourd'hui Dimanche j'ai pu assister à la messe, malheureusement le jour de la Toussaint, nous allons dans des tranchées de 4e ligne où l'on ne risque rien et où on est tranquille. Tous mes respects à toutes nos connaissances. J'ai vu Y.. A bientôt de tes nouvelles. Je t'embrasse bien tendrement.

Maurice

Prochaines lettres vers le 6 novembre
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14 octobre 2009 3 14 /10 /octobre /2009 20:38

Champagne-4-copie-1.jpg

En Champagne

 

Des tranchées allemandes dévastées par un bombardement français

 

 

 

 

 

Maurice est retourné au front, probablement dans  l'Argonne. il n' a pas été long à mesurer la dureté de la vie dans les tranchées. Froid, faigue, corvées, rat, poux, bombardements, mines, et...réconfort des colis qui arrivent en 3 jours seulement : tout est dit en l'espace de 2 lettres que je vous invite à découvrir
Thiaumont

Le 15 octobre 1915

 

Bien chère Maman,

 

J'ai reçu ta lettre . Excuse mon léger silence, je n'ai pas le temps. Nous sommes "crevés" de travail. 4 jours de 2e ligne, 4 jours de 1ere sous une avalanche de fer, faire des sapes, creuser des boyaux etc. Quand on revient en 3e ligne, nous avons des corvées à faire, construire des tranchées derrière la 1ère ligne, déboucher des boyaux obstrués par des obus etc. Enfin c'est la veille perpétuelle. Mon 1er séjour en 1ère ligne s'est bien passé. J'ai assisté comme acteur à une fusillade et une canonade terrible au commencement de l'avant dernière nuit. Nous avons fait sauter une mine sous la tranchée boche, d'où une mitraillade du diable pendant 1 heure ; on a dû en parler dans les journaux. Je vais manger car je repars en 1ere ligne construire des tranchées, quoique je sois en 3e ligne. Enfin j'ai pu me laver et me changer !! Les poux, puces et rats abondent. Si on dort les souris viennent vous rendre visite. Je t'embrasse de tout coeur.

Maurice

 

 

 

Le 21 octobre 1915

 

Bien chère Maman, Ai reçu ton excellent petit paquet; un de temps en temps ça cause un immense plaisir ; ce que je préfère : tabac à 0,5 ou 0,8, cigarettes, cigares, conserves, chocolat, bonbons, carte-lettres, etc.... tous les 15 jours  ça suffit et ça arrive vite ("3 jours). Je vais toujours bien. Les nuits sont horriblement fraiches dans les tranchées de 1ère ligne, car il faut être dehors sous la rosée, les boches sont si près. Hier nous avons eu 3 blessés dont le commandant de compagnie, cela pour des pétards à main. Leurs mauvais crapouillots nous arrosent souvent... Et Joseph, comment va-t'il ? Sa permission se passe- t' elle bien ? on nous a photographiés , je t'enverrai la photo quand je l'aurai. A bientôt de vos nouvelles. Sommes en 3e ligne ; demain retournons en 1ere. Je vous embrasse de tout coeur.

Maurice




Prochaines lettres vers le 23 septembre

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6 octobre 2009 2 06 /10 /octobre /2009 22:17

Tranchees Argonne

 

 

 

Après presqu'un an de trêve pour cause de blessure, Maurice revient aux dures réalités du front, c'est à dire des tranchées. Il n'a pas perdu, semble t'il sa combativité, en témoigne les lettres que voici...
Thiaumont

Le 6-10-15

 

Bien cher Joseph,

Suis toujours en bonne santé et au repos. J'ai reçu aujourd'hui ta carte et la Semaine religieuse, merci, cela me donnera de la lecture dans les tranchées car nous y montons ce soir. Je vais voisiner avec les Boches et cela à moins de 50 mètres, on va pouvoir jouer du pétard ; à moins qu'on ne les attaque pour les faire filer. Les canons tonnent dur et ?? cela fait plaisir, surtout après le gros succès du 25, 7e succès qui se continuera, espérons le !. A bientôt de tes nouvelles, je t'écrirais des tranchées si je le puis.

Ton frère qui t'embrasse bien fort  

 Maurice sergent 12e de  ligne  d'inf 48e  SP 74

 

 

Le 9 octobre 15

 

Bien chère Maman,

Je vais toujours bien malgré le gracieux envoi de marmites par les Boches, qui d'ailleurs font beaucoup de bruit mais causent peu de mal. Nous n'avons eu jusqu'ici qu'un blessé et par une balle. Suis en deuxième ligne dans un bois. De bonnes sapes nous mettent à l'abri des obus et des "minen". C'est de là que je t'écris. J'ai reçu ta lettre du 3 octobre et je vois que tu te fais beaucoup de peine ; je t'assure que tu ne dois pas te tourmenter, j'en suis déjà revenu et avec l'aide de Dieu j'en reviendrai encore et cette fois il faut espérer que ce sera la bonne, lorsque les Boches seront hors de chez nous et cela viendra plus vite qu'on ne pense. Allons à bientôt de tes nouvelles. Je t'embrasse de tout coeur.

Maurice

 

Le 12 oct 1915

 

mon cher Maurice,

Ta lettre du 6 m'arrive à l'instant. J'y réponds aussitôt. Tu fais bien de donner souvent de tes nouvelles et je te recommande toujours d'être très régulier à écrire. De cette façon personne ne sera inquiet. Je l'ai envoyé il y a 3 ou 4 jours un petit mot pour t'annoncer le deuil de la famille N.. Depuis je n'ai pas manqué un seul jour d'aller la voir

C'est samedi prochain que je compte partir en permission. J'arriverai probablement à Moras le lundi matin. Il y aura près de 15 mois que je ne serai pas retourné. Allons vite un mot. Merci de ta lettre. Je t'embrasse de tout coeur.

Joseph

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23 septembre 2009 3 23 /09 /septembre /2009 20:01

Tout a une fin : la convalescence de Maurice est belle et bien terminée puisqu'il rejoint toujours en tant que Sergent le 48e Régiment d'Infanterie de Guingamp 10 mois après sa blessure au pied. Paul, le médecin,   assiste de son côté aux préparatifs d'artillerie de la 2e offensive de Champagne ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Seconde_bataille_de_Champagne) qui semblent beaucoup l'impressionner. Pendant ce temps leur père et leur soeur Yvonne sont toujours en zone occupée à Maubeuge mais les nouvelles sont rassurantes.
Thiaumont



Cette photo provient du lien suivant http://chtimiste.com/batailles1418/1915champagne2.htm
qui donne des témoignagnes poignants sur cette offensive du 25 septembre 1915 (et celle concommittante en Artois) qui faillit réussir mais finit par s'enliser dans la profondeur des lignes défensives allemandes.






Ce 24 septembre 1915

 

Mon cher Joseph,

 

Je t'envoie la lettre d'Yvonne que te tranquillisera sur le sort de nos Maubeugeois. Ils arrivent à vivre assez facilement ; ça a l'air assez calme de leur côté. Je t'envoie également une de mes photos, la plus récente : elle est nette. Tu pourras l'envoyer à Maman après l'avoir vue.

Vas-tu toujours dans les familles N. ? Es-tu arrivé à les réconcilier ? Ce serait une bonne affaire, mais difficile à réussir probablement. Comme poste tu es bien tombé puisque tu peux profiter un peu de la vie de famille. Jacques Y. est-il toujours de ton côté ?

Je vais bien et attends patiemment les évènements. De l'endroit où nous sommes on entend toujours un bombardement formidable : Qu'est-ce que doivent prendre les Boches ! Si on pouvait les exterminer jusqu'au dernier ! Mon adjoint a l'air bien disposé à ne me faire aucun quartier. Ce sera une fête de massacre.

A bientôt de bonnes nouvelles.

Je t'embrasse bien fort.

Dr Paul B.

 

Ce 24 septembre 1915

 

J'espère, mon cher Maurice que tu as reçu ma petite épître et son contenu. Tu dois commencer l'instruction de la classe 17 : ça va te faire un nouveau travail. Ici nous assistons de loin à un bombardement formidable auprès duquel le roulement du tonnerre n'est rien. Ce que les Boches doivent prendre ! C'est prodigieux. Mon régiment est bien décidé à ne pas faire de prisonniers. Le temps est maintenant au beau depuis près d'un mois ; c'est très agréable; Cependant les nuits commencent à être très fraîches : ça sent l'hiver proche.

Je t'embrasse très fort

Dr Paul B.

 

 

Le  28 septembre 1915

 

Cher Paul,

j'ai bien reçu ta lettre et son contenu qui m'a été vite d'une grande utilité car j'étais désigné pour partir au 48eme. Maintenant me voilà redevenu poilu au 48eme de G. (NDLR Guingamp). Je me rapproche fort de toi, dans un bien triste pays car depuis que j'y suis, il ne fait que pleuvoir. Enfin j'espère toujours que cela finisse bientôt. Je t'embrasse ; A bientôt de tes nouvelles, ça barde (??)

Maurice

 

Le ?

 

Bien chère Maman, Comme je te l'ai déjà dit, je n'ai guère le temps d'écrire, aussi suis-je en retard avec tout le monde. Enfin je profite d'un petit moment de liberté pour te donner de mes nouvelles. J'ai reçu vos lettres ainsi que le saucisson que je conserve pour les tranchées (nous y retournons vers le 10-X. Je vais toujours bien malgré le froid qui est vif. Heureusement que le bois ne manque pas, nous sommes dans la forêt. Nous avons pris une douche avant hier, cela fait joliment du bien. On vient de toucher des sabots. A bientôt de vos nouvelles. Mon camarade de collège Vincent a disparu en Champagne. Est-il tué ? on ne sait ???Je t'embrasse très fort

Maurice


Prochaines lettres vers le 6 octobre 1915 

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16 septembre 2009 3 16 /09 /septembre /2009 21:20

En septembre 1913, Maurice avait conseillé à Paul d'économiser, alors que celui-ci était étudiant en médecine. Deux ans plus tard Paul lui rend fraternellement la monnaie de sa pièce...tout en demandant quand même à St Maurice, saint patron des soldats, de continuer à le protéger. Drôle d'intermède au coeur de la guerre.
A noter que votre serviteur, peut être par solidarité avec Maurice, c'est fait une  blessure au pied. En 1915, cette "fine blessure" était enviée car susceptible de vous sauver la vie en vous éloignant  quelque temps du front. En 2009, beaucoup moins d'intérêt...
Thiaumont




Le 16-9-15

 

Bien chère maman

 

rien de nouveau ici si ce n'est la nouvelle composition du dépôt qui se réduit à 6 compagnies au lieu de 8; ce changement nous a donné une centaine d'hommes en plus par Lt et 7 sergents pour la notre. a bientôt de  tes nouvelles. Voilà bientôt le 22 7bre et rien de  neuf ; il y aura après demain 1 an que je suis sergent.

ton Maurice qui t'aime de tout coeur.

 

Le 16-9-15

 

Bien cher Paul,

 

Je viens de recevoir ta carte lettre du 11, merci bien ; la mienne s'est croisée avec la tienne, en tout cas envoie moi bientôt de tes nouvelles ; je serais si heureux de te voir à l'arrière, car tu serais pour toujours à l'abri et maman n'aurait plus tant de soucis. Je joins à ma lettre le billet qu'Yvonne a pu envoyer par l'adresse que j'avais donné à maman. Ils ont l'air bien renseignés sur nous et sur tout ce qui se passe en France, tu verras d'ailleurs. Espérons qu'une victoire soudaine et prompte nous permettra de communiquer plus facilement avec Maubeuge et nous permettra aussi de les voir ; car si cela se  faisait avant mon départ je poserais immédiatement une permission pour Maubeuge. Toi revenu à l'arrière il te sera facile d'en faire autant. Allons bonne chance et bonne santé  et souhaitons que Septembre qui m'est si cher (??) et qui a St Maurice, patron des soldats, verra le ciel de France s'illuminer de l'éclat de la victoire. Je fête également le 18 7bre l'anniversaire de ma nomination de sergent. tu vois, à bientôt de tes nouvelles et !!!

Ton frère aimé qui t'embrasse de tout coeur

 

Maurice

 

ce 16 septembre 1915

 

Mon cher Joseph,

 

Eh bien ! Comment vas-tu ? Tu fais comme moi, tu ménages l'encre. Tu dois pourtant être dans les meilleures conditions que moi pour m'écrire. Dans une vie errante, une vraie vie de bohème, outre qu'on devient forcément paresseux, on n'est pas toujours à son aise pour donner de ses nouvelles. As-tu toujours beaucoup de travail ? L'affluence des blessés est-elle toujours aussi grande. Ca à l'air de s'être un peu calmé dans les Vosges. De notre coté nous essayons de profiter des derniers beaux jours de l'été. Et réellement ces jours sont beaux : pas  de pluie. Aussi je sors souvent sur mon cheval Djirb, l'enfant du désert, que j'ai depuis une quinzaine de mois. Je t'envoie sa photo, prise dans un pays où nous sommes restés longtemps. La photo est peu flou car c'est un agrandissement d'un petit cliché.

Je t'envoie une autre photo bien plus récente, mais mauvaise, prise lors d'une revue de Joffre, Kitchener...

J'ai de bonnes nouvelles de Maman et de Maurice. Maurice a de la chance de pouvoir profiter d'un aussi long repos. Il doit être bon instructeur. A l'occasion de sa fête, je lui envoie 50 francs pour ses menues dépenses. En ce moment j'ai la veine d'être le plus riche de la famille aussi je tâche de faire des économies qui ne seront pas inutiles après la guerre. Je pense que tu n'as besoin de rien. T'envoie t'on quelque chose de St Jean ? Tu me rappelleras au bon souvenir du chanoine M. et de ses soeurs et nièce. Le pauvre L. a été blessé. C'était presque inévitable. Que j'en ai vu de jeunes chefs de section blessés ou tués : c'est effrayant. Nous payons ainsi notre manque de préparation dont nous portons tous la faute. On ne voulait plus d'armée, plus de guerre : on tapait sur les officiers ; c'est à peine si l'on si l'on osait se dire patriote. Le réveil a été dur ; pourvu qu'il soit durable !

Madame L. m'a écrit que son mari souffrait de ses yeux. Il voulait se mettre automobiliste dans l'armée belge et c'est au volant qu'il a repris sa kératite. Parle-t'on dans votre ambulance de la relève des médecins ? J'espère qu'elle ne tardera pas. Il y a à l'intérieur assez de jeunes médecins pour nous relever et qui depuis un an ne cherchent qu'à se cramponner à leur « filon ». Malgré plusieurs propositions, je suis toujours à un galon. Je crois que les grands chefs du Service de santé s'inquiétent assez peu des médecins de complément. J'en ai pris mon parti. Souhaitons que la victoire soit proche et que nous puissions sous peu nous réunir. A bientôt de longues et fréquentes nouvelles mon cher Joseph ; je t'embrasse bien fort

Dr Paul B.

 

Ce 16 septembre 1915

 

Mon cher Maurice,

 

J'ai reçu ta carte lettre pleine de doléances sur la cherté de la vie. Tu mènes il me semble la vie à grandes guides. Il ne faut pas dépenser plus qu'on ne gagne. Le grand chic, sinon pour s'enrichir, au moins pour rester toujours dans une honnête aisance (aurea mediocritas) c'est de calculer ses besoins d'après son revenu. D'autant plus qu'il nous faut penser à ce qui se passera après la guerre. Tu auras toute la situation à faire et ce n'est pas une mince chose. Enfin trêve de conseils d'économie domestique. Je veux être bon prince et t'envoie en un mandat poste la somme de 50 francs. Tâche de les dépenser qu'à bon escient. Nous vivons dans un temps où il faut savoir se serrer la ceinture.

J'ai reçu les revues que tu m'as envoyées ces temps-ci : Annales, Je sais tout, Lectures pour tous, Revue hebdomadaire. C'est une bonne distraction dans ma vie errante. Tu peux m'en continuer l'envoi de temps à autre. Je les renvoie à Maman, comme cela Papa et Yvonne auront de quoi lire quand ils seront délivrés. Pourvu que cette délivrance soit proche !

J'ai reçu une lettre de ma Madame L.. Son mari voulait se mettre dans l'armée comme automobiliste. En ce moment il souffre des yeux et a été repris de sa kératite, rechute due au vent de l'auto. Il en a pour quelque temps.

J'ai du évacuer mon médecin auxiliaire malade : j'en ai un autre en ce moment qui est paraît-il d'un froussard...on va rire. Il est de Toulouse. Nous vivons ici au jour le jour dans l'attente des évènements. Le temps depuis une quinzaine de jours est superbe. J'en profite pour me promener souvent à cheval. Dans le lointain le canon gronde sans cesse.

J'attends patiemment la relève des médecins du front. J'espère que ça ne tardera pas trop. Il y a tant de jeunes médecins à l'arrière qui ne demandent qu'à venir au front !!

Es-ce que la classe 16 est convoquée ? Tu dois être à présent un instructeur épatant.

Voici le 22 septembre qui approche. Aussi d'ores et déjà je te souhaite une bonne et heureuse fête. Que St Maurice continue à te protéger !

Bonjour, mon cher Maurice, je t'embrasse bien fort.

Dr Paul B.

prochaines lettres vers le 23 septembre

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5 septembre 2009 6 05 /09 /septembre /2009 18:20

Je dois tout d'abord toutes mes excuses aux lecteurs de ce blog. Le récit de la course de trains  et les agapes qui ont suivi ne datent pas de septembre 1915 mais de septembre 1913, des temps heureux avant la guerre donc.
La lettre qui suit a une tonalité bien différente.
Je ne peux dans ce blog passer sous silence la mort du dernier combattant de la Grande guerre à avoir connu les tranchées, Harry Patch, décédé à l'âge de 111 ans le 27 juillet dernier. Cet Anglais avait été mobilisé à l'âge de 18 ans et blessé par un obus à la terrible bataille de Paschendaele (Belgique). Il avait, parait-il, par la suite qualifié la guerre de "crime organisé".
le voici  ci-dessous. La seconde photo, à droite, a illustré beaucoup de manuels scolaires anglais; c' est en fait une photo de composition réalisée semble t'il dans des tranchées de 2e ligne.
Thiaumont




Le 7-9-15

 

Bien chère maman,

 

Nous voilà bientôt à la mi-septembre et rien ne se produit, que c'est donc long !! Quant à moi je suis toujours en bonne santé et sur l'expectative. De Paul j'ai eu une lettre  il n'y pas très longtemps ; ils étaient en repos, au moment où il m'écrivait. De Joseph aussi une lettre ; il est toujours très bien et content de son sort, mais il se plaint d'être sans nouvelles de Paul. Les fraîches nouvelles de Maubeuge m'ont causé un vif soulagement et un immense contentement. Allons espérons toujours pour cette année et soyons confiants comme eux. il vient d'arriver ici une triste affaire; un sergent major du 127 a été assassiné par un poilu revenant du front, car celui-ci avait trouvé le sergent-m couché chez lui avec sa femme ; il a été arrêté ; ça date de ce matin. Hélas. Allons à bientôt de tes nouvelles. Envoie effets d'hiver (1 caleçon, chandail, gants) car il fait froid ici; Je t'embrasse de tout coeur.

Ton Maurice

 
prochaines lettres vers le 16 septembre...

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19 août 2009 3 19 /08 /août /2009 21:49
Un été de transition, presque joyeux, malgré l'absence de nouvelles de ceux qui sont  bloqués en zone occupée à Maubeuge (le père et la soeur Yvonne) : voilà ce qu'expriment ces quelques lettres de 1915. La correspondance redevient plus régulière après avoir été rare pendant quelques mois. Bonne lecture...
Thiaumont





Photo ci-dessous : 3 autres frères poilus juste avant la Grande guerre



Le 20-8-15

 

Cher maman,

 

J'ai reçu ta dernière lettre; depuis rien de nouveau par ici, sauf l'établissement d'une liste de départ. A la Cie je suis le 5e (?) car les spécialistes restent, et la plupart sont des types qui n'ont jamais vu le feu. Mon tour dans le départ est à peu près le 20ieme. Je n'ai encore rien reçu de Paul, aussi je ne lui envoie pas les revues que j'ai achetées pour lui car je ne sais si elles arriveraient, j'attends qu'il me donne son adresse, ou du moins qu'il m'écrive. Je vais toujours bien. Joseph m'envoie toujours la Semaine religieuse. J'attends de tes nouvelles et quelques sous pour combler la dépense du voyage et l'argent des revues; ici l'argent passe je ne sais où, et pourtant je ne fais rien d'extraordinaire. Je t'embrasse de tout coeur.

Maurice

 

Le 21-8-15

 

Bien cher Paul,

 

J'attendais toujours de tes nouvelles, car je croyais que tu aurais changé de secteur mais ne voyant rien venir je t'écris un mot pour te dire que tout va bien et qu'il n'y a rien de nouveau par ici. Ecris moi vite un mot. As tu fait bon voyage ? Resteras-tu encore longtemps là-bas ? Maman et Joseph vont toujours bien, rien de Maubeuge toujours, c'est dur. As-tu reçu ma carte d'Ahun ? Je ne vois rien d'autre à te dire. J'ai des revues « annales, lectures pour tous, je sais tout etc » ; où dois-je te les envoyer ? Écris vite. As tu reçu celles que je t'avais envoyées avant ta permission. Allons bonne chance et bon courage. Je t'embrasse de tout coeur

Maurice

tu pourrais renvoyer les revues soit à Joseph soit à maman qui les collectionnera

 

Le 21-8-15

 

Bien cher Joseph

 

J'ai bien reçu toutes tes « Semaines relig » où je trouve beaucoup de choses intéressantes, merci. Qu'y a t'il de nouveau là-haut ? Ici c'est toujours la même chose, depuis ma permission de 4 jours. J'attends mon tour. De Paul je n'ai aucune nouvelle depuis qu'il disait qu'ils changeraient de place. C'est bien long tout de même. Toutes mes amitiés à Monsieur et Madame L N.. A bientôt de tes nouvelles, je t'embrasse de tout coeur.

Maurice

 

Le 2-9-15

 

Bien chère Maman,

 

J'ai reçu ta bonne lettre, ainsi que celle de Paul. d'ailleurs Paul m'a enfin écrit, me donnant son adresse et me disant de lui expédier des revues, ce que je fais immédiatement. Ici toujours rien de nouveau, on attend patiemment les évènements qui, je pense, ne tarderont pas à s'accélérer. quant à Joseph il va toujours bien et m'envoie régulièrement la semaine religieuse. J'ai écrit au comité des réfugiés du Nord (Mr V. s'en occupe) pour avoir quelque chose, mais rien, on me réponds que les communications sont interrompues et que aussitôt qu'on aurait quelque chose au sujet de papa on m'écrirait. allons ayons toujours bon espoir, bonne santé et à bientôt de tes nouvelles; je t'embrasse de tout coeur. ton Maurice

 

Le 2-9-15

 

Bien cher Joseph

 

Rien de nouveau par ici, toujours la même vie. Nous envoyons des renforts  assez souvent. Aujourd'hui partent pour le front six sergents ou chefs de secteurs qui ne sont jamais allés au feu. On nettoie tout le monde, c'est de stricte justice. suis-je encore ici pour longtemps, car mon tour approche, à cause de tous ces départs. Je vais toujours bien, ainsi que maman et Paul ; mais nous ne recevons rien de Maubeuge. J'ai écrit au comité des réfugiés, mais il ne peut me fournir aucun renseignement, car les communications sont coupées. Va t'on essayer quelque chose il serait temps car l'hiver est proche ; ici il fait un temps très froid pour l'époque et il pleut à torrent. a bientôt de tes nouvelles. Je t'embrasse de tout coeur. Merci pour les "Sem relig" et ta carte de Salerne (?).

Maurice

 

Le samedi 6 septembre,               

 

Cher Paul

 

J'avais déjà commencé la lettre que je devais t'envoyer lorsque Joseph est arrivé ; le lendemain de son arrivée nous sommes allés à U., aussi n'ai-je pu continuer la lettre. Mais nous voici de retour et je remets la plume à la main pour te narrer tous les détails de notre voyage et de notre séjour à Moras et autres lieux. De Sous le bois à Valence nous avons fait bon voyage et nous avons été assez heureux pour assister à une course de trains entre deux rapides, le nôtre et celui qui filait vers Nevers sur une voie parallèle pendant près de 40 kilomètres. C'était une course folle vraiment magnifique ; tous les voyageurs étaient aux portières se mesurant, riant, criant comme sur un champ de courses. Les 2 trains pendant 10 minutes allèrent de pair puis l'autre sembla prendre de l'avance. Le mécanicien de notre machine, ne voulant sans doute pas se laisser devancer, chauffa fortement, si bien que notre convoi rattrapa l'autre et lui passa devant, notre train avait gagné ; mais ce fut superbe encore une fois et cela dura environ 20 minutes. Le train étant un rapide ne s'arrêta qu'à Laroche Dijon Macon Chalon Lyon et Valence où nous arrivions à 4h1/2.

On se promena , je pris un bain et à 9h1/2 ,nous frappions à la porte de Mr l'abbé G. chez qui on fit un succulent diner quoique ce fut Vendredi. A 1h nous repartions vers St Hilaire mais nous nous arretâmes à Valence pour aller voir Mme B. qui nous reçut très bien. nous avons vu Mr B. ancien percepteur mais il est sur le chemin de la folie et n'existe plus pour le monde. Il ne connait plus personne pas même sa femme, on l'a attaché à son bureau de peur qu'il ne fasse un mauvais coup, car il peut devenir furieux d'un moment à l'autre ; cela fait pitié et peur. A 2h nous arrivions à St Jean. Nous  n'y sommes restés que le 15 août ; mais nous avons pu entendre les beaux chants et voir le magnifique défilé des enfants du patronage avec leurs fanions et décorations. Joseph en est très fier et jubile quand il parle du patronage qu'il a réorganisé sur base militaire.

Le samedi nous allions diner chez Mme B. et nous repartions à 3h pour Moras où nous sommes arrivés à la nuit. A Moras nos visites faites on nous a invités de tout côté chez Mme M. d'abord, Monsieur A. ensuite puis Mme Q. et Mme A. qui nous retint à dîner et à souper ! Philomène nous a invités pour mardi prochain. oh à propos de Philomène, sais tu qu'elle s'est saignée aux 4 veines pour moi. Elle m'a payé un canif 4f50 et une bonne pipe Ropp 3f50, en outre et à l'abri des regards indiscrets , elle m'a glissé 50 f !!!! soit dit pour que je ne sois pas jaloux, j'ai accepté car j'en aurai bien besoin ?!?!?! Nous sommes allés ensuite à Renage passer trois jours ; on nous a très bien reçus, d'ailleurs tu dois savoir à quoi t'en tenir attendu que la tante t'a écrit. Enfin mardi dernier nous montions vers chifflet où nous attendaient les d'A.. Réception cordiale et chaude, baisers par-ci, baisers par  là etc etc. Nous y avons rencontré Mr J. appelé par tous , même les enfants, juju ; Mr d'A. ne faisait que lui faire des farces tant il est bonne créature. Le meunier étant parti Mr d'A. faisait le travail à la place, aidé de Juju qui lui donnait un coup de main pour soulever les sacs de blé et la farine. Bonne et abondante nourriture comme de coutume et gros et nombreux rires !!!!!

Mercredi Mme M. et ses enfants sont venus dîner à Chifflet. Nous avons vu le curé de St Jeure toujours bizarre et parlant surtout de chant grégorien dont il est un enragé partisan. Les relations avec Mr d'A. sont un peu froides. Mr d'A. a fait une assez bonne chasse. On nous a photographiés dans le jardin et on enverra des épreuves tirées par Juju. Nous sommes repartis le vendredi soir ; Joseph retournait à St Jean en passant chez Mme B. pour souper et coucher; Nous avons vidé le magasin non sans peine de tout son contenu, avec beaucoup de poussière. Le caveau est commencé. Quant à t'envoyer 50f papa ne peut pas ; mais je t'envoie les 50 que m'a octroyé Philomène en bons de poste. En ce moment nous arrangeons les marchandises. Je t'embrasse de tout coeur et t'envoie le bonjour des d'A. et de Juju etc

Maurice

Nous partons jeudi matin ; prière d'écrire de suite pour savoir si l'argent est arrivé.

Papa est furieux de tes demandes d'argent ; il dit qu'il prendra à ta caisse d'épargne si ça continue. N'en dis rien et brûle la lettre en songeant à économiser.



Prochaines lettres  vers le 7 septembre...

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